Cendrillon : vair ou verre ?

Les pantouffles de Cendrillon, sont-elles fait de verre (comme l’écrit Perrault) ou de vair, la fourrure de l’écureuil petit-gris, comme l’ont affirmé Balzac et Littré ? Wikipédia est assez exhaustive sur ce sujet…

On Language Log, Mark Liberman tackles the thorny question whether Cinderella’s slippers were made of glass (verre in Perrault’s French version, which Disney based their version on and thus re-popularised the fairy tale in the English-speaking world) or the fur of the grey squirrel (vair). The two terms are homophonous in French. Eggcorn or no eggcorn ?

I happen to have posted about the subject last December in the Usenet group soc.motss, and, unlike Mark, came to the conclusion that “glass” is probably not an error.

Below I reproduce my post. A few things to keep in mind:

  1. Perrault’s version is by no means the original of the story. He was, like the Grimm brothers who came later, a collector and editor.
  2. The French Wikipédia entry claims that vair, although a precious clothing material, was not used in shoe-making.
  3. Vair is indeed a current, if rare and specialised, French word.
  4. If verre is indeed what was intended by Perrault, I doubt the change to vair was a mishearing — I’d opt for a kind of learned hypercorrection.

On Dec 29, 2005, Chris Ambidge enquired about a potential French eggcorn

as I recall, Cinderella’s unusual footwear comes from a mistake (possibly an eggcorn, but I leave the diagnosis to experts). The original tale, as told in French, has Cinderella’s slipper made of fur - “vair”. Someone misheard that and wrote that her slipper was “verre” - glass.

and asked for opinions on the subject. He also wondered about the concept of dancing in slippers. I replied the next day:

It doesn’t look like it; rather, this seems to be a case of erudition run wild. Balzac’s and Littré’s (a nineteenth-century man of letters, author of an important dictionary), to be precise. They stipulated the verre/vair confusion. But “pantouffles de verre” (though in various spellings) are in Perrault’s tale, and also in Catalan, Irish and Scottish versions. The Grimm brothers’ has golden slippers — not much better than glass, I’d think, to dance in all night. Wikipedia tells me that there are over 400 versions from all over the world, the oldest from China. (Disney used Perrault, by the way, so the glass slippers became a feature of the story most English-speaking children get to know best.)

As for “slippers”, the French “pantouffles” isn’t what you’d use to refer to dancing shoes either, nowadays. “Vair” is the fur of a grey squirrel, btw.

Will we clear this up to everyone’s satisfaction?


Sur Language Log, nous trouvons une introduction complète et intéressante à l’alphabet coréen hangeul (한글) par Bill Poser. En 1446, le roi Sejong le Grand demanda à un groupe de savants de créer un système d’écriture permettant à la population, largement analphabète, l’accès à l’écrit. Le coréen était alors rarement écrit : la langue utilisée pour les écrits fut le chinois classique. La lecture et l’écriture étaient donc réservés à une petite couche de savants et de nobles, presque exclusivement des hommes. À l’occasion de lu jour de la commémoration de la publication du hangeul, qui se fête justement aujourd’hui, Bill Poser nous offre une abondance d’informations culturelles et linguistiques. (Ceux qui rechignent à la lecture en anglais, l’article de Wikipédia serait une alternative pour fêter le jour du hangeul.)

Bookforum propose un article de Jesse Sheidlower, éditeur du Oxford English Dictionary, sur le dictionnaire de Samuel Johnson, publié il y a 250 ans. C’était le premier dictionnaire de l’anglais dans le sens moderne du terme.

Et pour en venir au français, ABC de la langue française nous apprend que Le Petit Robert fait de la pub avec des… poteaux roses. Bon, d’accord, ils n’utilisent pas (encore ?) cette appellation, mais le premier volet de leur nouvelle campagne publicitaire joue sur la substitution tirer au flanc»tirer au flan (image .gif). Les poteaux roses, c’est utile ; comme ils disent en anglais, the proof is in the pudding.


Les rennes en rose

Some eggcorns seem to transcend languages. Or rather, some idioms seem to undergo eggcornification in several languages at once. In English, scapegoat has been turned into escape goat and scrapegoat. As for the French equivalent, bouc émissaire has at least four eggcorn versions.

The extremely common eggcorn rein»reign has a French cousin, too. Except that in French, people don’t take the reigns, but the reindeers of power.

According to my estimate, prendre les rennes de … amounts to over 10% of the instances where standard French would have required rênes.

J’ai déjà fait allusion à cela : certaines locutions semblent plus enclines que d’autres à se laisser transformer en poteaux roses. Et le phénomène peut transcender les frontières linguistiques. Ainsi, le pauvre bouc émissaire pointe le nez déguisé en bouquet misère, bouquet mystère, bouc et misère, bouc et mystère et ainsi de suite. Mais son homologue anglais n’est pas mieux loti: pour scapegoat, la petite tribu des eggcornologues a déjà relevé escape goat et scrapegoat.

Quand une locution a un équivalent dans une autre langue, il est sensé de chercher des poteaux roses équivalents. D’autant plus que parfois, dans chaque langue, il existe toute une flopée de paronymes aux racines et étymologies apparentées.

Un « eggcorn » particulièrement fréquent, au point qu’on peut le considérer comme presque acceptable en langue standard, est la substitution de reign(s) (« règne(s) ») pour rein(s) (« rêne(s) ») : dans l’ordre décroissant d’acceptabilité les locutions free reign, reign in et take the reigns of power sont extrêmement courantes. Au point que toutes les trois se retrouvent sur les pages de journaux de qualité (dont le Guardian).

Le français, de son côté, connaît prendre les rênes du pouvoir (ou d’autre chose d’ailleurs), littéralement la même expression qu’en anglais. Comme substitut, règnes, phonétiquement trop éloigné de rênes, ne convient guère. Mais que trouve–t-on dans dans les petits billets de mon ami Laurent Gloaguen ?

  • « La charmante Emmanuelle Skyvington, journaliste de son état, coupable d’un dossier grand-public sur les blogues dans Télérama, mettant en vedette, de façon indue, un blogueur prétentieux et imbu de lui-même, vient de prendre les rennes du blogue de l’hebdomadaire sus-cité. » (lien)

Et il est loin d’être le seul … quelques centaines d’auteurs de site web ont fait pareil. Et pas n’importe qui :

  • « En attendant de prendre les rennes de l’Europe en 2008, l’Anglais pourrait gonfler son record personnel en 2006, Ian Woosnam n’écartant pas l’idée de sélectionner Faldo si celui-ci présente un niveau de jeu lui permettant de rivaliser avec ses adversaires américains. » (Radio France)
  • « Fin prêt à prendre les rennes du pouvoir, le nouveau chef libéral a d’ailleurs déjà promis un poste de premier plan au ministre Ralph Goodale, afin de contrer le sentiment d’aliénation de l’Ouest canadien. » (Radio Canada)
  • « Le rôle de la région et de la communauté internationale doit être renforcé par la volonté des Haïtiens eux-mêmes de prendre les rennes du développement.  » (ONU)
  • « Darius estime alors qu’il est le seul capable de prendre les rennes de l’émission mais le succès lui monte un peu à la tête et il ne tarde pas à se prendre pour Néron. » (ifrance)

Nous sommes à un taux de plus de 10% de poteaux roses, selon l’estimation livrée par les moteurs de recherche.

L’ère équestre est derrière nous, et les mammifères ruminants de la famille des Cervidés vivant dans les régions froides de l’hémisphère nord (je copie sur le TLFi) ont pris le dessus.

Ce poteau rose a de beaux jours devant lui.


Les poteaux roses, c’est auripilant

The word horripilant comes from horreur and not from any word that derive from the root aur- (gold).

Asphondylia auripila is a little gall midge, presumably covered in golden body hair.

  • 2005-07-22
  • Comments Off

Trouvailles : Quel plaisir de faire violence à ce qui auripile nos oreilles. (lien) […] il se donne un genre qui m’auripile et je ne supporte pas sa façon de massacrer les chansons de nos grands chanteurs français. (lien) La n’est pas la question, mais ça m’auripile de vous entendre dire: “Attention aux motos Ecoles”, vous en avez eu […]

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… et où l’on les découvre vraiment

French eggcorns, the list.

Continuation du billet précédent, coupé en deux pour raison de longueur excessive. Voici donc la liste des poteaux roses français : héraut » héros : Un héros de la lutte contre le SRAS élu président de l’Association médicale chinoise (lien) ôter » hauter : Mon père avait sélectionné avec soin deux sabres pour nous hauter la vie, […]

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… où l’on découvre les poteaux roses

This is a long overdue post on French eggcorns, with an introduction and (in the second instalment) a collection of about 40 of “poteaux roses”.

Les lecteurs/trices francophones qui ne jettent pas les gants devant les billets rédigés dans la langue de JK Rowling ont déjà rencontré un genre d’entités mystérieuses appelés eggcorns. Il est grand temps que /ser.ənˈdɪp.ɪ.ti/ leur consacre un article en français. Le voici. L’histoire des eggcorns a débuté il y a deux ans, quand les professeurs de […]

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Launching a new project of the calibre of the Eggcorn Database — modest as it is in the greater scheme of internet things, certainly increased my stress levels. Suddenly there are registered users and opinionated commenters (not to mention technical glitches). So I have been fighting feelings inadequacy and anxiety about potentially disappointing the […]

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More reading

Fred Vargas, Pars vite et reviens tard. À lire.

Now for some reading material that’s more commonly considered escapist: mystery novels. First I have to make a shameful admission: I knew that Fred Vargas is a woman, but didn’t pick up on the fact that she is French. English first name + Spanish last name = American, in my heuristics. I therefore put off […]

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