Trouvé sur Glaukôpidos, via caelestis de chez (ou le ? je ne sais jamais) sauvage noble, alors, le voilà, comme promis : le nouveau poème de Sappho V.O. (grec ancien), trouvé sur un papyrus de l’Université de Cologne.

῎Υμμες πεδὰ Μοίσαν ἰ]ο̣κ[ό]λ̣πων κάλα δῶρα, παῖδες,
σπουδάσδετε καὶ τὰ]ν̣ φιλἀοιδον λιγύραν χελύνναν·

ἔμοι δ᾽ἄπαλον πρίν] π̣οτ᾽ [ἔ]ο̣ντα χρόα γῆρας ἤδη
ἐπέλλαβε, λεῦκαι δ’ ἐγ]ένοντο τρίχες ἐκ μελαίναν·

βάρυς δέ μ’ ὀ [θ]ῦμο̣ς̣ πεπόηται, γόνα δ’ [ο]ὐ φέροισι,
τὰ δή ποτα λαίψηρ’ ἔον ὄρχησθ’ ἴσα νεβρίοισι.

τὰ <μὲν> στεναχίσδω θαμέως· ἀλλὰ τί κεν ποείην;
ἀγήραον ἄνθρωπον ἔοντ᾽ οὐ δύνατον γένεσθαι

καὶ γἀρ π̣[ο]τ̣α̣ Τίθωνον ἔφαντο βροδόπαχυν Αὔων
ἔρωι φ̣ . . α̣θ̣ε̣ισαν βάμεν’ εἰς ἔσχατα γᾶς φέροισα[ν,

ἔοντα̣ [κ]ά̣λ̣ο̣ν καὶ νέον, ἀλλ’ αὖτον ὔμως ἔμαρψε
χρόνωι π̣ό̣λ̣ι̣ο̣ν̣ γῆρας, ἔχ[ο] ν̣τ’ ἀθανάταν ἄκοιτιν.

(Ce sont des lettres grecques Unicode, faut donc installer une police convenable, le cas échéant.)

Il est où, mon dictionnaire et le précis de poétique ?

Mise à jour du 1 juillet 2005:

  1. Après un petit débat intéressant dans le salon bien agréable de Language Hat, j’ai corrigé deux erreurs dans la transcription. William note sèchement qu’est un rare cas de voir un cas de corruption de texte se dérouler devant ses yeux..

  2. Caelestis a encore davantage, dont une translitération en alphabet latin. Aussi, c’est un vrai philologue qui s’y connaît.

  3. Il y a une légère controverse sur le sens de l’adjectif ἰόκολπος modifiant “des muses”. La traduction anglais de West (copiée ici) a « fragrant-blossomed » (aux fleurs parfumées). Mais la dépèche Reuters basée sur ses contributions donne « fragrant-bosomed » (aux seins parfumés), ce qui semble correct à priori — « les seins [au parfum de] violettes »). D’autres prefèrent y le mot « ceinture » et interprètent la référence aux violettes comme sa couleur.

  4. Et pour les germanophones : deutsche Übersetzung des Sappho-Gedichts, avec commentaire de Michael Gronewald (Uni Cologne), l’un des chercheurs qui l’ont découvert.


I won’t write, or not yet, and in any case not exhaustively, about what kept me off the blogosphere for so long, or indeed entirely offline. But I’m recovering, I think. My apologies go to all e-mail correspondents whose notes I still have to fish out of the mess in my inbox, and to answer.

This blog’s first birthday is put off till when the road is a bit less bumpy.

What about the new poem in this entry’s title, you’re wondering? It is actually over 2600 years old: another one of Sappho’s works has been discovered. Just lucky that the Egyptians used poetry as mummy wrappers.

This is only the fourth of her poems that, to our knowledge, has survived the centuries reasonably complete. In the Times Literary Supplement, Martin West tells the story and publishes his translation. Enjoy its beauty:

[You for] the fragrant-blossomed Muses’ lovely gifts
[be zealous,] girls, [and the] clear melodious lyre:

[but my once tender] body old age now
[has seized;] my hair’s turned [white] instead of dark;

my heart’s grown heavy, my knees will not support me,
that once on a time were fleet for the dance as fawns.

This state I oft bemoan; but what’s to do?
Not to grow old, being human, there’s no way.

Tithonus once, the tale was, rose-armed Dawn,
love-smitten, carried off to the world’s end,

handsome and young then, yet in time grey age
o’ertook him, husband of immortal wife.

(The Reuters wire got the first line wrong and writes fragrant-bosomed instead of fragrant-blossomed.)

If I manage to get my hands on the original Greek, I’ll add it.

Since this blog is bilingual, there’s a problem now: I don’t have a French version (and will certainly not try to provide even an approximate one). Therefore, as a bonus, here is Renée Vivien’s poem Tu m’oublies, from her collection Sapho (1903):

L’eau trouble reflète, ainsi qu’un vain miroir,
Mes yeux sans lueurs, mes paupières pâlies.
J’écoute ton rire et ta voix dans le soir…
Atthis, tu m’oublies.

Tu n’as point connu la stupeur de l’amour
L’effroi du baiser et l’orgueil de la haine ;
Tu n’as désiré que les roses d’un jour,
Amante incertaine.

Want more? Go here or here.

Update: The original Greek text is here.

Je ne traiterai point, ou pas encore, et en tout état de cause pas à fond, de ce qui m’a tenu éloignée de la blogosphère — en fait, de la plus grande partie du monde en ligne. Mais je suis en train de me remettre, un peu, je crois. Je présente mes excuses les plus abjectes à tout ceux et celles dont des messages gisent au fond de ma boîte aux lettres, mélangés à des ordures épistolaires et toutes sortes d’autres missives prêtes à jeter.

Le premier anniversaire de ce carnet et reporté jusqu’à ce que la route sera légèrement moins ardue (la pente étant encore raide … si je puis me permettre le calembour).

Quid du « nouveau poème » dans le titre, vous me demandez ? En vérité, il a plus de 2600 ans ! Des archéologues ont en effet découvert un morceau sorti de la plume de Sappho (pas littéralement, hein), dans des papyrus qui servirent à emballer des momies en Égypte.

Ce poème n’est que la quatrième de ses œuvres à-peu-près complète qui nous est parvenue. Dans le Times Literary Supplement, Martin West raconte l’histoire et publie sa traduction anglaise . Dans le poème, Sappho parle de son âge qui avance, des changements que subit son corps, du fait qu’elle ne peut plus participer aux danses des jeunes femmes qui l’entourent :

[You for] the fragrant-blossomed Muses’ lovely gifts
[be zealous,] girls, [and the] clear melodious lyre:

[but my once tender] body old age now
[has seized;] my hair’s turned [white] instead of dark;

my heart’s grown heavy, my knees will not support me,
that once on a time were fleet for the dance as fawns.

This state I oft bemoan; but what’s to do?
Not to grow old, being human, there’s no way.

Tithonus once, the tale was, rose-armed Dawn,
love-smitten, carried off to the world’s end,

handsome and young then, yet in time grey age
o’ertook him, husband of immortal wife.

Si j’arrive à dénicher la version grecque, ou si quelqu’un tente une bonne traduction vers le français, je vous ferai signe.

Cela me gêne un peu de n’avoir que la version anglaise à proposer. Donc, en bonus, le très beau poème Tu m’oublies de Renée Vivien, extrait de sa collection Sapho de 1903, trouvé ici :

L’eau trouble reflète, ainsi qu’un vain miroir,
Mes yeux sans lueurs, mes paupières pâlies.
J’écoute ton rire et ta voix dans le soir…
Atthis, tu m’oublies.

Tu n’as point connu la stupeur de l’amour
L’effroi du baiser et l’orgueil de la haine ;
Tu n’as désiré que les roses d’un jour,
Amante incertaine.

M-à-j : La version grecque est ici.